23/02/2010

Être né quelque part... Où Dieu a choisi... Ou le hasard nous a jetés!



Être né quelque part... Où Dieu a choisi... Ou le hasard nous a jetés!


Imaculada Conceição
(date: 04/07/1999)


Je suis née dans une banlieue de la périphérie d’une fameuse ville touristique, la “ville merveilleuse”, comme elle est connue dans le monde entier; une ville trop chaude (dans tous les sens du mot), située dans un pays tropical aussi riche en beauté qu’en contradictions. Une terre paradoxale, d’une beauté énigmatique, pleine de sensualité, de rhythimes et sons, d’odeurs et goûts, de couleurs et lumières, de symbols et signes, de réligiosité et fêtes, de mysticismes et de mystères... Une terre de multiples perspectives et regardes, aussi pleine de simulacres, fantaisies et masques que de réalité, d’une realité aussi dure que corageuse, pleine d’espoir...

Je suis née au printemps (1*), sous la constelation de Virgo, mais ce n’est pas à cause du signe zodiacal qu’on m’a donnée pour nom le signe de la Vierge. C’était pour remercier Dieu que ma mère a choisi des noms religieux pour tous ses enfants. Elle avait toute sorte des difficultés de fécondation et de procréation et les médecins, à l’époque, ne savaient pas comment les résoudre. Alors elle a demandé au ciel le miracle de nos vies. La vie est toujours un miracle, quand même. Et qui peut l’expliquer?

Des huit enfants que ma mère a eus, je suis la seule à ne pas naître d’acouchement naturel. Et puisque je ne voulais pas sortir à l’heure du ventre de ma mère, qui a souffert pendant trois jours à l’hôpital à cause de mon retard, on me comparait à notre anti-héros national, Macunaíma, le personnage de Mario de Andrade, qui disait tout le temps “Aïe! Quelle paresse!” Pendant toute mon enfance, il n’y avait pas de jour où on ne m’a pas rappellée ces détails; peut-être pour chercher une explication raisonnable à ma personnalité: je n’étais pas une petite trop hâtée à faire les choses. Il fallait du temps... La précocité, ce n’était pas mon fort, et ne le sera jamais. Il faut toujours du temps...


Quand on est terminé la césarienne, et je suis venue au monde, c’était presque minuit, la veille d’un vendredi treize. J’ai eu de la chance, malgré toutes les prévisions défavorables des médecins, qui ne croyaient plus à ma réussite.

Mes parents étaient sûrs que je serais brune comme mon arrière-grand-mère maternelle parce que je suis née si rouge et avais les cheveux si noirs que je semblais les bébés de certains peuples. Mais j’ai grandi blonde et mes courtes et grosses jambes sont la seule marque physique de mon héritage indigène. Dans mes veines, coule le sang des prémiers habitants du Brésil: l’Indigène, le Portugais et l’Espagnol. Et comme il me manquait ainsi l’un d’eux, le Nègre, la vie m’a destinée une marraine noir, l’épouse de mon oncle (lui, mon parrain), pour avoir le sang dans l’esprit. Mon baptême a été célébré à l’église de Notre-Dame de Guadeloupe, la patronne de l’Amérique Latine et de ma banlieue, qui a reçu ce nom en hommage à la Vierge.

On me raconte que j’étais un bébé mignon, joli et très charismé. Tous aimaient me prendre des photos et me porter sur les bras. Mais ce que faisait la vraie joie de ma famille, c’est que j’avais surtout une bonne santé. Cependant, après les premiers mois de vie, ma constituition est devenue si faible que, pour tout et pour rien, je tombais malade. Alors on m’a entourée de soin.


Mais, curieusement, ce que personne n’avait remarqué, c’est qu’il me manquait quelques millions de neurones. J’ai eu quand même de la chance et, comme toutes mes soeurs du monde entier, j’ai grandi comme un humain normal, et je suis devenue un être aussi pensant et rationel que nos frères (humains) et que les savants qui ont découvert que ces petites cellules manquaient à toutes les filles. Encore une fois, le hasard m’a été favorable, car dans cette terre où j’ai formé mon esprit et ma chair, les femmes ont l’opportunité de conquérir “un lieu”, comme dit-on ici, “un lieu au soleil” (au moins, à la plage).

Mon premier berceau était une boîte de bois pour garder des fruits que mon père avait demandée, d’urgence, au marché pour me faire un berceau provisoir. Ma famille avait peu d’argent, et comme ma mère avait acouchée trois enfants morts avant de mon arrivée à ce monde, mes parents ont décidé de ne plus acheter ni la layette ni le berceau avant d’être sûrs que le bébé serait vivant. J’y ai bien réussi, j’étais la pure volonté de vivre. Quelques temps après ma naissance, on a pu m’acheter un beau berceau. Il était tout noir, plein de figures colorées et possedait un voile blanc. Plus tard, on l’a remplacé par un autre, tout jaune et aussi pleine des figures. C’est à cause de ces figures-là, aussi drôles que sûcrées, atachées par ma soeur aînée, selon son goût de jeune fille adolescente, que j’ai pu retenir dans ma mémoire les souvenirs de mes prémiers lits. Ma soeur a conservé pendant des années son cahier de poèmes où elle avait décalqué des figures similaires. Je les voyais fréquemment, et on sait que c’est la fréquence qui nourrit la mémoire. Chez moi, nous avions tous accès à son cahier parce qu’elle y avait copié une poèsie “anonyme” (plus tard, on a découvert que c’était Manuel Bandeira) et que notre mère voulait que nous apprenions. Il s’agissait d’un petit écrit dont mon père, un fou romantique, lui avait fait cadeau à l’époque de leur mariage. C’est par hasard que mon père a trouvé ce poème, écrit sur un morceau de papier, sans le nom de l’auteur, jeté dans une poubelle d’une toilette public et qui lui semblait avoir l’air de ma mère (c'est à dirte... le poémè, bien sûr...). Moi, en devinant peut-être mon avenir (aujourd’hui je travaille surtout avec les images), je ne faisais guère attention aux poèmes, j’aimais les figures. Cependant, les mots sont si attachés aux souvenirs de mon coeur, que je pense qu’ils ne me laisseront jamais et poursuivront pour toujours mon destin.

Voilà ainsi quelques événements qui ont marqué mes prémiers jours dans ce monde et qui ont fait naître dans mon âme un amour passionné de toutes les choses kitsches et bizarres. Kitsch, comme l’air de cette terre qui fait respirer ma vie. Bizarre, comme seule la vie même ne peut être.

Tous les jours, je remercie Dieu d’être née où je suis née. Et même si Dieu n’est pas là, je remercie ce drôle de hasard qui a jeté ma vie dans cet endroit. Presque tout me plaît ici: le climat chaud, trop chaud, la lumière du soleil, les fortes couleurs, les rhythmes vibrants et pulsatifs, les saveurs ardentes, les goûts piquants, et tous les odeurs tropicaux: des fleurs, des fruits, surtout les vapeurs qui sortent des arbres, des plantes et de la terre umide après l’orage d’été exhalant partout ses énivrants parfums. Ici, même en hiver, il fait beau et l’air est si parfumé qu’on a envie de ne fait rien que ne soit le sentir.


S’il y a un élément qui pour moi est le signe de cette terre, ça c’est la chaleur. Cette chaleur qui est partout, qui pénètre tous les domaines. De la nature jusqu’à l’ambience pluriel de notre culture. Mais ce qui me passionne autant qui m’étonne ici, ce sont surtout les gens, qui sont toujours gais, chalereux, comunicatifs, créatifs, optimistes même quand il leur arrive le pire: le chômage, l’exclusion, l’exploitation, le mépris, la famine, les maladies, les violances sans aucun sens, les humiliations, les tueries provoquées par les buts les plus bêtes, le plus stupides et banals, les trahisons, les injustices... Ça, c’est notre terre, comme dit la lettre d'une musique: la terre enchantée (et il faudrait peut-être l’exorciser!).

Ici, le paradoxe est partout! Il y a autant de corruption, de subornations, de tromperies et mensonges, de violations aux droits, d’une sordide indifférence devant toute sorte de perversité à la dignité humaine que d’une sincère volonté d’être éthique, honnête et juste. C’est une terre vraiment chaude! Mais pleine d’espérence et de foi pour la vie. Et malgré tout ce qu’il y a ici d’abjecte, d’insoutenable, d’éthiquement reprouvable, de moralement condamnable ( - mais dans quel lieu de cette planète ces choses n’y arrivent jamais? - ), mon être est si attaché à la chaleur de cette terre que parfois je me demande comment doit être (sur)vivre dans un endroit où il fait toujours froid. Pour moi, la vie est pleine s’il fait chaud.

Mais peut-être c’est pour être née ici que je pense ainsi... Et peut-être c’est pour penser ainsi que je trouve trop difficile de bien compendre l’avis qui demeure encore chez quelques esprits au norte de la ligne de l’équateur (c’est-à-dire là-bas, où habite la tradition de la pensée et de la connaissance – et le froid!). C’est incroyable, mais il y a encore ceux qui pensent que, dans ce côté de l’hemisphère, il n’y a pas de péchés... Et non plus de la pensée. Car la pensée, la “vraie pensée,” arrive seulement s’il fait froid. Le climat chaud et umide, c’est le climat favorable aux plaisirs du corps, de la chair, et non pas aux réfléchissements de l’esprit. Enfin de compte, ce n’est pas le climat chaud et umide, le climat favorable à toutes les espèces de vermines? Et les vermines n’ont pas d’âme inteligente. Ou, au moins, pas encore.


Mais, si c’est vrai qu’après la catastrophe de la fin du monde, l’un des êtres à survivre à l’holocauste serra les vermines... Alors, nous sommes les previlégiés: chez nous, habite la pensée de l’avenir. Dieu merci d’être née ici!

*NOTE

(1) Lisez les commentaires.

1 commentaire:

  1. Por aqui eu eu escrevo em português...

    Gostaria de observar que neste meu antigo texto em francês há algumas inverdades (creio que só três).

    A primeira é que não nasci na primavera! A primavera começa dia 23 de setembro no hemisfério sul, como nasci no dia 12 (véspera de 13 é doze, óbvio! hehehe), portanto, ainda no inverno!

    Segundo, eu não nasci na véspera de uma sexta-feira 13 (mas é verdade que nasci quase a meia-noite!)! Creio que nasci numa terça ou quarta (vi num desses calendários permanentes, mas não me recordo mais exatamente o dia da semana!)!

    Por último, a poesia que meu pai presenteou minha mãe (a tal, encontrada numa lixeira de banheiro público) não era de Manuel Bandeira, mas de Vinícius de Moraes; e também não foi na ocasião do casamento deles, mas na de um de seus aniversários de casamento!

    O restante (creio eu, se não me distrai ao reler...), por mais bizarro que possa parecer: é a mais pura verdade! ;)

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